Crédit photo: Teycir Mastour et Aïda Hammad
Le vendredi 14 juin 2019, nous étions près de 500’000 à faire l’Histoire en Suisse, à l’occasion de la Grève des femmes – Grève féministe. La revendication-clé de ce mouvement est l’exigence d’une égalité réelle, à la fois entre femmes et hommes, mais également entre femmes.
Les Foulards Violets est un collectif
composé de femmes musulmanes ou non, portant le foulard ou non, solidaires de la
cause des femmes portant le foulard en Suisse et qui paient ce choix par de nombreuses
discriminations à l’emploi, à la formation et à l’accès aux activités
culturelles et sportives. Et qui font malheureusement souvent face à des
comportements hostiles ou insultants. Il nous a semblé indispensable de
thématiser cette situation à l’occasion de la Grève car, en Suisse, comme dans
le reste de l’Europe, l’hostilité et les
discriminations islamophobes sont des phénomènes genrés, touchant de façon
disproportionnée les femmes musulmanes. Au-delà de ces revendications
spécifiques, nous nous reconnaissons entièrement dans les revendications
générales de la grève (égalité salariale, meilleure reconnaissance du travail
domestique et de care, lutte contre le harcèlement et contre la culture du
viol, etc).
Nous avons lancé notre appel à mobilisation moins de deux semaines avant la manifestation nationale, où nous invitions les personnes se reconnaissant dans nos revendications ou solidaires à nous rejoindre à Genève, munies d’un foulard violet, qu’il soit porté sur la tête, autour du cou ou de la taille. Nous étions donc loin d’imaginer que nous serions si nombreuses. Entre 100 et 120 personnes ont marché derrière notre bannière. Des collégiennes en survêt’, des mères au foyer avec leur poussette, des femmes retraitées venues en vélo, des « working girls » à la manucure parfaite… il n’y avait pas de « profil-type » de la manifestante au foulard violet. C’est toutes ensemble que nous avons marché, scandé des slogans, pris des selfies par centaines, dansé. Jamais comme en ce 14 juin nous n’avions vécu aussi intensément la solidarité et la sororité. Nous ne vous cachons pas que nous avons été émues, larmes aux yeux, plus d’une fois.
De nombreuses personnes sont venues nous parler et nous poser des
questions. Beaucoup nous ont complimenté de notre énergie, voire ont exprimé une
sincère surprise quant au fait que des femmes musulmanes portant le foulard
puissent se définir comme féministes, qu’elles puissent se montrer fortes et
vocales. Bien que ceci était fait dans une grande bienveillance, ces réactions
d’étonnement restent révélatrices du manque flagrant en Suisse de
représentations positives, nuancées et diversifiées des femmes portant le
foulard et de leurs réalités de vie.
Bien que la très grande majorité des réactions à notre égard étaient
positives, nous ne pouvons ni ne devons omettre de parler de certaines
hostilités auxquelles nous avons dû faire face, de la part de certain-e-s
autres manifestant-e-s. « Vous êtes une honte », « vous défendez
l’oppression des femmes », « si vous avez un problème avec les coutumes
suisses, rien ne vous retient de rentrer en Arabie Saoudite ou en Iran »
sont des mots qui nous ont été adressés plusieurs fois. Certaines autres
personnes ont trouvé nos revendications légitimes, mais ont jugé que nous
étions « trop bruyantes ». Nous n’avions pourtant ni mégaphone, ni
micro, ni musique, mais simplement de vraies raisons de se faire entendre . Ce
type de critiques sur le fait que nous aurions pris trop de place et trop de
visibilité ne peut que nous rappeler la manière dont certains hommes estiment
qu’une femme prenant la parole publiquement ou ne se laissant pas marcher sur
les pieds est forcément une hystérique agressive, une misandre qui rêve de les
émasculer. A ces personnes nous le disons haut et fort : se résigner
sagement à la place qui nous a été assignée n’est pas dans nos projets. Nous
tenons à préciser qu’aucune de ces personnes hostiles n’était membre du comité
organisateur de la Grève, dont les membres ont toujours été solidaires et
soutenantes avec nous.
Et maintenant ? C’est une question qui nous est souvent posée. Pour
être franches, nous savons exactement ce que nous voulons défendre, mais nous
réfléchissons encore aux meilleurs moyens d’action pour le faire. Nous
prendrons le temps qu’il faut pour le définir, mais attendez-vous à entendre
parler de nous très vite.
Nos slogans/pancartes :
- Voile ou pas, c’est mon choix !
- Solidarité avec les femmes du monde entier
- A ceux qui veulent dominer les femmes, les femmes
répondent RESISTANCE !
- Une voix sous mon voile
- Lâche mon foulard tu m’étouffes
- Mon foulard couvre mes cheveux, pas mon cerveau
- A trop vouloir me sauver tu finis par m’oppresser
- Droits pour TOUTES
- Ne me libérez pas, je m’en charge!
- Wrapping it like Fatima, Swaging it like Halima
- Les mêmes diplômes, pas les mêmes emplois
- Mon corps, Mon choix
- Je m’en bats le voile
- Égalité pour TOUTES les femmes
- Refuser une candidate à cause de son foulard?
C’est pas bonnard!
- Mon corps, mon choix
- Dans une société inclusive, chacun a sa place
- Diplômée jusqu’aux dents, au chômage depuis 10 ans
- JE lâche mes cheveux, TU te rases la tête, IL a
des dreadlocks, ELLE porte le foulard, NOUS nous acceptons
- Arrêtez de politiser nos corps
- Arrêtez de politiser nos choix
- Arrêtons de parler d’ELLES comme étant le
problème, parlons de NOUS TOUTES comme étant la solution
- Mon foulard n’est pas la cause de mon oppression,
mais le prétexte qu’il prend pour justifier mon exclusion”
- Pour les droits de TOUTES les femmes
- Solidarité avec les femmes qui portent un foulard
- Egalité entre les femmes de Suisse
- Sororité avec les femmes voilées
- Porter ou ne pas porter le foulard, ce n’est pas
aux patrons de décider !
- Avec ou sans foulard: aucune influence sur les
compétences.
- Toutes ensemble : résistance !
- Foulard ou pas foulard : la différence est dans
les yeux de celui qui regarde